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Téo Betin

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Texte composé par le lauréate pour la remise des bourses le 18 novembre 2022 

Images Imaginaires


J’ai entrepris depuis 2020 un projet intitulé Images Imaginaires : je sillonne la Provence afin de créer un corpus d’images qui questionne l’iconographie de ce territoire, en privilégiant une photographie s’appuyant sur une expérience du réel.
 

Entre 1880 et 1960, la Provence est à la fois une terre de refuge et d’exaltation pour les plus grands artistes. C’est ici que les peintres révolutionnent le médium, de la couleur à la forme. Ils présentent une perception du rivage méditerranéen entre mythe et réalité, vécu comme une nouvelle Arcadie. La Provence est un pays au climat doux et aux paysages magnifiques, une terre épargnée par la modernité et imprégnée de traditions. Tous ces aspects favorisent une idéalisation de la région, qui permet de gommer ses aspérités. La Provence entre dans l’Histoire comme le grand atelier de l’art moderne.
 

Si chacun de nous a aujourd’hui une image de la Provence, notre imaginaire collectif n’est-il pas plus tourné vers le passé que vers le présent ? La Provence s’est pourtant radicalement transformée après la seconde guerre mondiale. Elle est devenue une immense aire de production, les zones industrielles grignotant les terres agricoles, l’habitat périurbain se développant en bordure des centres historiques. Sans chercher à suivre une trame narrative unique, je m’intéresse plus précisément à l’arrière-pays, que les guides de l’époque dénommait la ‘Provence mystérieuse’.
 

Les habitants de la région sont les acteurs du projet Images Imaginaires. L’histoire de l’art en Provence est marquée par une représentation de la figure humaine dans des activités et des cadres bien précis (les travaux agricoles, les activités maritimes, les scènes d’intérieurs, les baigneuses). Mon projet a pour objet, d’une part, de questionner et réinvestir ces cadres et, d’autre part, d’en proposer de nouveaux. Je cherche à approcher le genre du portrait dans toute sa complexité, en privilégiant des séances de poses collaboratives avec mes sujets. Dans ce contexte, j’accorde une attention particulière au rapport du corps à l’espace urbain.

 

Paysages et natures mortes composent la carte de mon projet Images Imaginaires. En Provence, les villes et villages sont pour le plus souvent centenaires et composés de plusieurs strates d’habitats traversant les époques, du moyen-âge à l’après-guerre jusqu’à nos jours. Photographier la juxtaposition de ces différentes formes d’urbanisme me permet de créer des images dont le sujet est tout autant l’architecture que le passage du temps. En procédant à une réduction radicale de la forme et de la couleur, mon intention est de reconstruire une ville provençale intemporelle et imaginaire, à la lisière de l’abstraction.

Vasantha Yogananthan

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